En effet, la délibération n°006-2013 / CSLC-CM a statué sur la suspension de parution pour une durée de quatre (4) mois des journaux « Thalassa », « L’Observateur » et « le Trottoir ». Dans la dite délibération, la commission d’audition reproche aux journaux :

– « Thalassa » d’avoir publié l’article « Après la lettre de LEKOUNDZOU, des révélations de sang sur SASSOU seraient faites par DABIRA » dans son édition n°402 du 30 avril 2013 ;

– « L’Observateur » d’avoir publié l’article « Stratégies de conservation du pouvoir : les documents qui prouvent que le régime actuel ne laissera jamais le pouvoir après 2016 » dans son édition n°515 du 3 mai 2013 ;

– « Le Trottoir » d’avoir publié l’article « le Congo entre les mains des « fous » dans son édition n°82 du 29 mai 2013 ;

Dans cette délibération, le CSLC les accuse de « publication d’article séditieux, de propagation de fausses nouvelles, manipulation de l’opinion, incitation à la violence et à la division, diffamation ou atteinte à l’honneur et à la considération de certaines hautes autorités de l’Etat dans leurs livraisons respectives courant le mois de mai 2013 ».

Le journal « Le Glaive » est suspendu pour 4 mois pour ne pas avoir répondu à une convocation du CSLC au mois de février, combien même que son délégué s’était présenté au siège du CSLC au mois de mai suite à une convocation postérieure. A ce jour, il n’a toujours pas reçu la notification de sa suspension.

A titre de rappel, le CSLC avait suspendu le journal « La voix du peuple » en septembre 2012 pour une durée de neuf mois (9), et le journal « la vérité » pour une durée six mois (6) en février 2013.

Le Conseil Supérieur de Liberté et de la Communication est un organe constitutionnel chargé de veiller au bon fonctionnement de la liberté de l’information, et de la communication (article 161 et 162 de la constitution). La loi organique n°4 – 2003 du 18 janvier 2003 détermine les missions, l’organisation, la composition et le fonctionnement de Conseil Supérieur de Liberté et de la Communication. Cependant, cette institution n’a le droit de suspendre les organes de presse qu’en cas de non respect des cahiers de charge. Les sanctions infligées aux journaux précédemment cités sont donc arbitraires puisque la loi ne les prévoit pas. L’article 8 de la loi organique n°4 – 2003 lui donne la possibilité d’infliger à un organe des sanctions financières.

« Lorsqu’un organe de presse se rend coupable de violations manifestes et répétés des lois et règlements régissant la liberté de presse et de communication, le conseil de la liberté de communication à pouvoir de lui infliger des sanctions financières dont les modalités sont déterminées par voie réglementaire ».

Par ailleurs, les procédés utilisés par le CSLC portent à réflexion : les journalistes sont convoqués par téléphone, sans aucune notification écrite. Les résultats des auditions ont été présentés à Télé Congo en date du 1er juin 2013 sans qu’ils n’aient été préalablement transmis aux intéressés. Il leur a fallu organiser une conférence de presse en date du 3 juin 2013 pour qu’une notification écrite étayant les accusations leur soit transmise. Les accusations précédemment citées n’étaient pas accompagnées d’un argumentaire pouvant les justifier.

L’OCDH constate que le point commun entre ces journaux suspendus de parution est leur ligne éditoriale très critique à l’égard de la mauvaise gouvernance qui prévaut au Congo.

De plus, le CSLC a décidé d’effectuer un contrôle technique et financier des journaux congolais. Aucune disposition légale ne prévoit cette activité : le statut du contrôleur, la méthodologie et la finalité de ce contrôle. Ainsi, cette action est perçue comme une manœuvre pour museler les journaux qui ont une ligne éditoriale portée sur les questions de gouvernance démocratique et d’instauration de l’Etat de droit. Cette crainte est alimentée par le fait que certains directeurs de publications des journaux précédemment cités reçoivent des appels de la part des hauts responsables des administrations policières, les menaçant de mort s’ils ne changeaient leur ligne éditoriale.

L’OCDH considère la délibération CSLC comme un abus et excès de pouvoir. Au lieu de garantir la liberté de communication, il s’est attelé à conditionner cette liberté. L’avalanche de suspensions massives de parution de journaux pendant des durées excessives décrédibilise son action.

Au regard de ce qui précède, l’OCDH recommande vivement au gouvernement :

– De faire respecter la Constitution dans ses dispositions relatives à la liberté de la presse ;

– De veiller au respect de la loi organique n°4 – 2003 du 18 janvier 2003 déterminant les missions, l’organisation, la composition et le fonctionnement de Conseil Supérieur de Liberté et de la Communication ;

– De prendre les mesures nécessaires pour faire annuler sans condition la délibération n°006-2013 / CSLC-CM.

– De faire cesser les menaces envers les responsables des organes de presse ;

– De garantir en toutes circonstances les libertés de presse et de la communication telles que garanties par la déclaration universelle des droits de l’Homme.